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La pertinence niveau personnel

Même si l’ACES est encore en phase d’évolution, le principal frein à son utilisation n’est pas d'ordre matériel mais personnel. En effet, lors des échanges avec différents professionnels en France, c’est le serpent qui se mord la queue. D’un côté, il y a les studios français qui ne veulent pas de cela, brandissant l’argument du manque de professionnelle formée. Et, du côté des professionnels, il n’y a pas de volonté à se former, car ils n’ont pas le temps pour utiliser l’ACES dans les productions, et pas le temps de se former, pour une solution que les studios ne veulent pas adopter. Le résultat fait que l’ACES est mise de côté, malgré les avantages et possible gain de temps à l’étalonnage surtout. Ce qui se passe, c’est que de nombreux étalonneurs se sont formés sur le trois voies, lors de l’apparition de l’étalonnage analogique puis numérique. Par conséquent, c’est surtout un travail à l'œil qui est effectué, dans le sens où, pour harmoniser deux plans de deux caméras, ces personnes vont plus facilement faire confiance à leurs visions, et ils trouvent cela plus efficace, car cela fait quelques années qu’ils travaillent ainsi. “C’est ce que les étalonneurs ont toujours fait. Ils ont pris des images, de différentes caméras (...) et ils ont utilisé leurs yeux pour les classer en quelque chose qui fonctionne comme une seule unité”1. Une première fracture s’opère, où, pour un même programme de 52min, des étalonneurs expérimentés vont faire confiance à leurs visions, et au pire des cas, utiliser des LUT’s si besoin, alors que des étalonneurs récemment diplômés, dès qu’ils y a deux plans de différentes caméras avec deux espaces colorimétriques différents, ils vont utiliser l’ACES. Impossible de dire qui a raison, et qui a tort, car ce sont deux méthodes différentes qui fonctionnent. Dans quelques années, l’ACES se développera sûrement, car ces jeunes étalonneurs abusent peut-être de l’ACES, mais misent plus facilement sur cette outil afin de gagner du temps dans le travail d’étalonnage, notamment sur un 52min, là où le temps dédié à l’étalonnage est assez court. Même si l’ACES ne permet pas de faire correspondre deux plans, notamment si ces deux plans ont été enregistrés en Rec 709 avec deux caméras différentes, cela permet déjà d’avoir un plan en log qui s’affiche en Rec 709, mais garde la plupart des propriétés du S-log, ce qui rend le rushe assez maniable afin de le faire correspondre avec l’ensemble du projet.

Mais, une deuxième fracture s’opère aussi. Les personnes à l’origine de l’ACES et de son développement, ce sont les Américains. Là où le HDR et le Wide Gamut améliorent la qualité de l’image, et dont le spectateur observe la différence à l’image, l’ACES n’est qu’un outil pour améliorer le workflow. Un projet en ACES ou non, il y a pas de différence à l’image, cela n’a pas réellement de répercussion sur la qualité de l’image diffusée. Par conséquent, en France, pas mal de professionnels sont réticents à son utilisation, uniquement lié à l’origine de l’ACES. La réticence est clairement présente chez les étalonneurs, car après tout, c’est un système qui fonctionne, alors pourquoi se tourner vers un autre système.
Cela est amplifié par les plateformes, là où les plateformes françaises demandent les fichiers master pour effectuer les différentes versions pour la diffusion, Netflix demande, pour une production Netflix, à ce que le projet livré soit en ACES, et non en Rec 709 ou sRGB. Même si des étalonneurs expérimentés utilisent l’ACES pour ce genre de projet, les idées restent les mêmes, et cela ne les convertit pas à l’utilisation de l’ACES. Peut-être que l’ACES pourra se faire une place dans le paysage de la post-production audiovisuel française avec ces studios qui demandent le projet en ACES. En revanche, son utilisation ne sera pas majoritaire, car il restera des habitudes, qui fonctionne tout autant, mais qui resteront intouchable tant que l’ACES ne sera pas imposé par les producteurs autres que les productions financées par Netflix. Autant pour l’étalonnage, les positions restent les mêmes, et l’ACES a dû mal à s’implanter, autant pour tout ce qui est FX, l’ACES arrive à se faire une place plus grande. C’est paradoxale puisque les projets ne sont pas en ACES, l’étalonnage non plus, mais pour l’export des FX, là où les grands studios ont des positions assez ambiguës sur l’ACES, les indépendants se tournent plus facilement vers ce workflow, pour la création des FX dans les différents projets. Cela est possible, puisque pour les FX, il est conseillé d’exporter le plan en question, pour avoir la bonne durée. Ainsi, au lieu de l’exporter en Rec.709, il est possible de l’exporter en ACES CG AP1, puis de l’exporter sous le format de diffusion (Rec.709, DCI.P3,...).

1 Steve Green, directeur de SGO. Prononcé au NAB 2015 https://www.youtube.com/watch?v=c82LJzmQE9E

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